mercredi 3 avril 2013

Mini-mateur



Ce soir, une copine m’avait proposé un apéro que je me suis vue dans l’obligation de refuser.
D’abord, parce qu’elle voulait me présenter un ami. La description qu’elle m’a faite de lui était très bien, jusqu’à ce qu’elle précise qu’il est dentiste. Très mauvaise expérience pour moi, les dentistes (cf chroniques du 20/03/2013). Je n’ai aucune envie d’avoir l’impression que, lorsque son pote me mate pour savoir si je suis à son goût, il imagine en réalité le fond de ma bouche. Et a fortiori… le fond de ma gorge. NON MERCI !
Ensuite, parce que ma sœur est de sortie, et que par conséquent, je suis la baby-sitter (comprenez dompteuse) de son fils (comprenez mini-fauve).
Je rentre donc à mon appartement avec mon neveu dans les bras. L’ascenseur est en panne. Pourquoi ? Parce que j’ai pas d’bol.
6 mois. 6 étages à pieds. 3,5 tonnes de bébé.
Comment un petit être tout récemment débarqué sur la planète peut-il peser si lourd ?
Je me suis vue dans l’obligation de le poser par terre à chaque palier pour reprendre mon souffle. Ne tenant pas encore assis tout seul, il a systématiquement chuté lentement sur le côté, hilare, pour tenter ensuite péniblement de soulever son corps potelé à la force de ses non-abdos. Je dois avouer m’être foutu de sa gueule. Il est marrant, le petit gros.
Mais que ce soit clair, ma sœur ne doit jamais jamais jamais (jamais !) connaître cette histoire…

Arrivée chez moi, je le pose (comprenez l’encastre) dans mon pouffe pour qu’il cesse de finir le front par terre. Je lui donne une petite cuillère pour qu’il la contemple (béatement) et la mordille (sans dents).
« Tu vois, Chucky ? Je l’ai dit à ta mère qu’il fallait qu’elle arrête de t’acheter des dizaines de jouets puisque tu t’amuses avec trois fois rien ».
En entendant cette phrase, il éclate de rire, ce qui confirme mon intuition qu’il n’est pas très futé, le mini-fauve…

Comme j’ai très envie de me doucher, je l’installe avec moi dans la salle de bain et commence mon activité préférée avec lui : lui raconter ma vie amoureuse. Il écoute toujours mon monologue avec grand intérêt et beaucoup de fou-rires (ce qui a tendance à me vexer) et reste bien sage pendant ce temps là.
Je lui parle du Crapaud avec qui j’ai récemment eu un rencard (cf chronique du 27/03/13).
«  Mon humour lors de ce premier rencard a porté ses fruits, tu sais Chucky ? J’ai passé l’épreuve HAUT-LA-MAIN ! Il m’a envoyé le traditionnel texto-du-lendemain-du-rencard-réussi… attends… je vais te lire… » lui dis-je en me déshabillant et en attrapant mon portable.
« Il m’a envoyé : « Magnifique soirée avec toi princesse. A remettre très vite. Bisous ».  Tu vois Chucky ? Il a fini son texto par « bisous ». C’est très bon signe. Tu verras quand tu seras grand et qu’on t’envoie un « bisou », ça veut dire que c’est dans la poche. La preuve, c’est que deux jours après, il m’a renvoyé un deuxième texto-finissant-par-bisou pour m’inviter à un concert, vendredi soir prochain. J’ai commencé par sauter de joie, même si je suis condamnée, d’ici là, à ne rien manger mis-à-part des concombres histoire de perdre cinq kilos » poursuis-je en criant un peu depuis la douche.
« Non parce qu’il y a des chances que vendredi soir, il se passe des choses d’adultes entre le Crapaud et moi, tu sais Chucky ? Des choses que je ne peux pas encore t’expliquer, tu es trop petit et objectivement, tu ne comprends rien. Mais lorsqu’on va faire ces choses d’adultes, il faudra que je me déshabille. Ça va être très gênant pour moi, vois-tu ? Car sous mes airs de princesse-adepte-du-sport-et-de-la-nourriture-saine, se cache une flemmarde-mangeuse-de-Big-Mac-en-surpoids. Alors je risque d’être gênée en me déshabillant devant lui, tu vois ce que je veux dire Chucky ? ».
Je me retourne vers lui en sortant de la douche, étonnée qu’il n’ait pas éclaté de rire une seule fois à l’écoute de mon monologue.
Il ne rit pas. Non.
Il me regarde les yeux écarquillés, en se balançant lentement d’avant en arrière et en laissant couler un généreux filet de bave sur son pyjama.
Je suis à poil.
Je vais mettre un cierge pour que le Crapaud en fasse autant vendredi. 

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